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Le site d'Aster, dessinateur humoristique pour la presse d'entreprise


Le dessin et la caricature dans la presse
au travers d'une étude du
Rôle social et de la fonction journalistique des dessinateurs dans la presse quotidienne nationale en Communauté française de Belgique.


Mémoire de fin d'étude de Jean-Philippe Legrand, alias dessinateur Aster
,
présenté en vue de l'obtention du grade de Licencié en Information et Communication présenté à l'Université de Liège en 1998.

Historique de la caricature
La profession de dessinateur
Les dessinateurs dans la presse belge
Utilité et fonction



Partie I : Histoire de la caricature dans la presse

Chapitre I. GENESE DE LA CARICATURE DE PRESSE

Préambule Une histoire de la caricature de presse ici pour objectif de nous faire mieux apprécier la place que tiennent aujourd'hui ses représentants dans l'univers médiatique belge francophone, par rapport à leurs prédécesseurs, ainsi que de présenter en quoi consistèrent ses premières applications. Nous n'allons pas nous étendre sur l'évolution des procédés ironiques et graphiques car, à ce niveau, les amalgames avec d'autres domaines de création tels que le pamphlet en images, la peinture, la bande dessinée ou les arts du spectacle sont nombreux et mériteraient d'être développés. Par contre, nous avons tenu à focaliser notre regard sur les principaux protagonistes ainsi que sur les organes de presse qui les ont employés ou les emploient toujours. Comme dans toute démarche historique, nous nous intéresserons également aux événements dont ils ont été les observateurs.
Dans cette entreprise, la caricature française tient une position relativement importante. Ceci pouvant paraître quelque peu hors propos, nous sommes amenés à avancer les trois
raisons principales de ce détour au pays de Marianne et d'Anastasie (1).
Tout d'abord, les ouvrages consacrés à l'évolution de la caricature de presse en France sont abondants, ce qui n'est malheureusement pas le
cas pour la Belgique, a fortiori francophone. Dès lors, pourquoi ne pas nous remémorer ce que l'Histoire a retenu comme les "classiques" du genre?
Ensuite, si la Belgique s'est montrée relativement autonome dans ce domaine et ce, depuis bien avant 1830, on ne peut occulter la double influence française sur les productions de nos compatriotes. D'une part, il s'agit d'une influence indirecte, qui transparaît dans un certain nombre de thèmes abordés dans les caricatures et qu'il faut attribuer à un impérialisme culturel exercé par la France au fil des décennies. Ainsi, les progrès techniques, la production artistique, la mode, etc. venus de France n'ont pas été sans effet sur la société belge dépeinte par nos caricaturistes. D'autre part, on constate une influence directe que l'on pourrait appeler filiation ou "discipularité" et qui se remarque au niveau des codes graphiques. De Daumier à Plantu, les caricaturistes français ont fasciné des générations d'illustrateurs, y compris leurs contemporains belges pour qui le couronnement était - aurait été ou serait - de "parvenir à placer leurs dessins" dans un journal (satirique) français. Au XIXème siècle, un des meilleurs moyens de s'assurer une certaine renommée consistait d'ailleurs à passer plusieurs années à Paris, comme Félicien Rops et Armand Rassenfosse, ou d'y rester, comme Jules Renard(2). L'exemple le plus marquant du rayonnement français est sans doute l'influence de la génération Hara-Kiri/Charlie-Hebdo, "l'événement journalistique des années soixante" selon Françoise Giroud (3), non seulement sur nos dessinateurs mais aussi sur les organes de presse et de télévision habilités à fixer les modalités de leurs collaborations, en ce compris la liberté de ton.
Et enfin, l'exemple français se révèle instructif sur le rapport de la caricature de presse à l'actualité politique, sociale ou juridique. En effet, en observant comment, en France, la presse satirique illustrée réagit face à diverses situations (telles que la censure politique ou la libéralisation de l'expression, les temps de guerre ou les temps de crise interne, un changement de régime, etc.), l'on parvient à dégager des caractéristiques inhérentes au dessin de presse. Quoique relativement intuitives, ces variables structurelles permettent de se figurer le comportement, dans un contexte donné, de cette forme d'expression identique en France et en Belgique. Or, les ouvrages sur le dessin de presse en Belgique ressemblent plutôt à des manuels illustrés d'histoire nationale. En conséquence, c'est afin de pouvoir traiter cet ensemble de données conjoncturelles qu'il convient d'appliquer les propriétés quasi permanentes du dessin de presse, et donc de débuter par l'étude du modèle français
.
1) Symbolisant respectivement la France et, par
ses ciseaux, la Censure.
2) Alias "Draner". A ne pas confondre avec Jules Renard, l'écrivain français auteur de Poil de carotte.
3) Françoise Giroud citée par DAUBERT, Patrick et VASSEUR, Didier, Trimédia Spécial Dessin politique, in Trimédia, n°16-17, été-automne, éd. de l'Ecole Supérieure de Journalisme, Lille, 1982, p.34.

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Chapitre I. GENESE DU DESSIN DE PRESSE

Déterminer quelle époque et quelle contrée ont vu naître les premiers dessinateurs de presse n'est pas chose aisée. D'autant plus que, dans son acception actuelle, le "dessin de presse" réfère à une réalité pour le moins très différente de ce qu'on lui offre habituellement comme ancêtre. Loin de n'être que pure "illustration", le dessin de presse actuel intègre plusieurs dimensions dont on ne peut, dans une démarche historique rigoureuse, exclure ni la genèse, ni le développement. L'esprit de contestation dont il est imprégné, l'humour à la fois dénonciateur et exorcisant qu'il distille, le public auquel il s'adresse et enfin les différentes techniques de réalisation, de reproduction et de diffusion sont autant de caractéristiques indissociables de sa forme imagée. Cette précision faite, nous tenterons de considérer ces autres paramètres, sans accorder de primauté à la forme du dessin. Ainsi, remonter aux graffitis de l'Antiquité (1) grecque et romaine, voire à l'Egypte et ses fameux animaux satiriques sur papyrus (2) , est une démarche habituelle intéressante et pleine de curiosités mais inappropriée au dessin d'actualité qui ne se réduit pas à la simple représentation d'un personnage. En fait, ce n'est réellement qu'à partir de 1830 (année de la Révolution des journalistes suivie de la Révolution belge) que l'on peut parler de "dessin de presse", puisque ce n'est qu'à cette époque qu'il accompagne l'information écrite sur un seul et même support. Il possède alors toutes les caractéristiques acquises dans ses étapes antérieures. Il constitue par ailleurs une forme relativement "aboutie" et très proche, voire supérieure, à ce que nous entendons aujourd'hui par "dessin de presse".
1) COURTOIS, Luc et PIROTTE, Jean, Images de la Wallonie dans le dessin de presse (1910, 1961), éd. François Humblet, Louvain-la-Neuve, 1993, p.6.
2) RAGON, Michel, Le dessin d'humour. Histoire de la caricature et du dessin d'humour en France, Seuil, Paris, 1992., p19.
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§1. Le dessin satirique

Si l'animalisation (1) est assurément une des techniques les plus anciennes et les plus universellement utilisées dans les représentations - songeons aux mythologies -, ce n'est qu'au début du Moyen-Age, qu'elle sera pratiquée de façon systématique et engagée. Dans une société déjà encline aux superstitions et au surnaturel, un Christianisme en plein essor déverse une imagerie dualiste faite d'ânes, de boucs, singes et porcs symbolisant et stigmatisant les vices de l'homme. Et tandis que les livres se peuplent de personnages fantasmagoriques, la satire s'éveille au grand dam des moines, chevaliers, prélats et médecins. Cependant, les livres étant peu répandus à cette époque, les détenteurs de la vraie satire, écho du "bon sens populaire", restent les bouffons et les ménestrels.
A la fin du XIIIème siècle, une partie des dessinateurs s'affranchissent du texte et les premières images indépendantes apparaissent avec le colportage, placé sous le contrôle de l'Eglise. Au XIVème, siècle est introduit le support actuel et définitif du dessin: le papier. Avec la mise au point du procédé de la gravure sur bois (xylographie) vers 1400, l'image devient pour la première fois reproductible et, grâce à l'abaissement du coût, "démocratique". L'invention d'un procédé d'imprimerie, la typographie, par Gutenberg vers 1440 va quant à elle contribuer au développement du colportage. Ainsi, progressivement, un certain nombre de procédés satiriques se développent; le support papier se répand; des corporations organisées assurent la reproduction et la diffusion de ce média , qui n'a déjà plus rien à voir avec les enluminures du haut Moyen-Age, à l'exception d'un attachement aux thèmes bibliques. A ce stade, le dessin d'illustration et le dessin d'humour sont en place. Seules la pertinente indignation, la subtile irrévérence et surtout la considération pour la chose politique, chères au dessin de presse, sont absentes des productions graphiques.
1) La représentation de personnages humains en animaux.
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§2. Le dessin politique et la Réforme

Au XVIème siècle, les conditions se trouvent réunies en Europe occidentale pour que l'engagement timoré des dessinateurs se convertisse en un véritable militantisme. Les bouleversements politiques, philosophiques, scientifiques et religieux interagissent avec un corps social dont une grande partie se voit dotée de moyens d'information et d'expression autrefois réservés à une minorité dirigeante. Dans ce contexte qui voit naître la galaxie Gutenberg (1), almanachs illustrés, mercures, traités "scientifiques" mais aussi placards, libelles, pamphlets et estampes satiriques deviennent des tribunes pour les dissidents politiques et religieux. Certains artistes illustrateurs se révèlent particulièrement menaçants pour l'autorité établie et leur entrée effective à cette époque sur le marché des idées rend compte d'une véritable (re)découverte de l'efficacité percutante de l'image sur les masses illettrées. Un événement proprement "d'actualité" donne le ton: la Réforme de 1517.
La publication, rendue possible par l'imprimerie, des 95 thèses de Luther génère un trouble sans précédent dans les convictions religieuses, politiques et économiques européennes. La Réforme séduit, indigne, divise. Ecrivains de tous poils et illustrateurs sont non seulement des témoins privilégiés, mais aussi les acteurs d'une crise qui, en fournissant chaque jour son lot de persécutions, alimente leurs pamphlets. Leur indignation n'a d'égal que leur engagement. La prise de position est obligée et l'irrévérence est devenue monnaie courante. Désormais, le dessin sera militant, politisé, socialisé et teinté de contestation. En France, face à cette tradition contestataire qui se met en place, la réaction de François Ier est d'instaurer une censure, laquelle sera vite débordée par le flux d'écrits opposés aux excès de la noblesse. Il en sera de même de l'Index institué par l'autorité religieuse catholique. Henri IV, par contre, se sert de l'image pour glorifier son règne et combattre ses ennemis.
Une autre conséquence de l'imprimerie et de la diffusion des images est une série d'innovations dans la forme de celles-ci. Tandis que l'influence d'arts nouveaux en provenance de Flandre et d'Italie se fait ressentir dans toute l'Europe et donne des oeuvres de qualité, des ateliers suisses et allemands acquièrent une réputation dans le domaine de la gravure. A partir de la fin du XVIème siècle, l'imagerie d'Epinal commence à s'exporter… Quelques auteurs se font connaître: Pierre Eskrich, Léonard Odet, Pierre de la Maison Neufve, Jacques le Chaleux, Gabriel de Saconay et, sous Louis XIV, cible des Hollandais, le célèbre Jacques Callot, formé en Italie. Là, le peintre Annibale Carracci, et même Léonard de Vinci (voir illustration), dit-on, s'adonnent à un "art" encore inconnu en Europe, mais qui ne va pas tarder à faire des émules tels Le Bernin, William Hogarth ou Charles Le Brun: la "caricature"(2)
1) Selon l'expression de Mac Luhan. 2) De l'italien caricare qui signifie charger, ce mot apparaît pour la première fois en 1646 dans un recueil de "petits portraits chargés" réalisés par l'un des frères Carracci.
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feutre noir : "Aster" - (Jean-Philippe Legrand) - Cartooniste/dessinateur freelance depuis1999, Licencié en Journalisme - Prestations internationales.
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